Le conseil municipal calamiteux du vendredi 15 avril, a vu mes onze collègues voter un réseau de 8 caméras de vidéosurveillance qui devraient couter à la mairie dans les 80000 euros, plus 3000 euros de maintenance annuelle,sous les conseils de la gendarmerie. Mes collègues ont interrompu mon intervention afin de ne pas rater la projection d'un film et une sauterie qu'ils avaient organisé entre eux. Voici l'indigne comportement des élus majoritaire, refusant la réflexion sur un sujet qui est loin de faire l'unanimité et pour lequel des villes organisent des débats publics afin que chacun se fasse une idée, comme à Toulouse
Dans ses conseils en sécurité, la gendarmerie est l'instrument d'une scandaleuse imposture.
Je reviendrai point par point sur le diagnostic proposé par les gendarmes. Cet article a pour but de dénoncer les mécanismes de cette imposture, qui va se répéter dans tous les villages en zone de gendarmerie sous les injonctions du ministère de l'intérieur. Il faut que les citoyens et les élus ouvrent les yeux et refusent de mettre les doigts dans cet engrenage sécuritaire inutile et terriblement onéreux . Qu'ils ne répondent pas au subventions alléchantes qui ne sont là que pour obtenir leur adhésions sans réflexions honnêtes sur l'utilité d'un tel système. Qu'ils ne se fassent pas d'illusion même avec la subvention, la videosurveillance coutera très cher, et la maintenance sera à la charge de la collectivité locale, pour une efficacité en matière de protection quasiment nulle, je le démontrerai.
Diagnostic de sureté système de vidéoprotection
La gendarmerie propose aux communes qui en font la demande un diagnostic de sureté système « vidéoprotection ». Ce rapport est gratuit et heureusement ! Il ne vaut pas plus ! C'est un agrégat de propagande sur la vidéosurveillance et des avis techniques sur le positionnement des caméras dans le village, truffés de biais que n'importe quel imbécile pourraient repérer du moins, n'importe quel malfaiteur. Enfin ils nous donnent les perspectives d'avenir de ce système, vers plus de caméras et l'évolution vers un système de monitoring en temps réel, dont nous verrons les couts exorbitants.
Le diagnostic de sureté de la commune de MUS commence par une propagande sans preuves sur l'efficacité de la vidéosurveillance. En effet, Aucune étude chiffrée sur l'efficacité de ce système n'a été donnée en France. C'est efficace parce que les gendarmes le disent !
J'exhorte les élus à demander les preuves . La gendarmerie vous sortira alors, le rapport sur l'efficacité de la videosurveillance réalisé à la hâte de février à juillet 2009 par leur seul service et sur commande du ministère de l'intérieur avec pour lettre de mission je cite :
« mettre à disposition des élus des arguments propre à soutenir leur adhésion »
(Note à l'attention du président du comité de pilotage stratégique pour le développement de la videoprotection)
Source : Inspection générale de l’administration, de la gendarmerie et de la police nationale. Rapport sur l’efficacité de la vidéoprotection, Ministère de l’Intérieur, de l’Outre Mer et des collectivités territoriales, juillet 2009.
Ce rapport a été réalisé par l'inspection générale de la police nationale, l'inspection de la gendarmerie nationale et l'inspection générale de l'administration. Pas un sociologue n'a été convié à l'analyse des conclusions. Il est truffé de biais méthodologiques et de chiffres paradoxaux qui, si l'on s'y penche un peu, disent le contraire des conclusions très favorables à la vidéosurveillance.
Mais revenons à notre diagnostic de sureté local.
Les gendarmes nous donnent un tableau de l'évolution de la délinquance dans MUS. Sur deux ans ! Comme s'ils n'avaient pas les chiffres sur 5 ans.
Et qui montre quoi ? que la délinquance est en baisse !
2009 : 46 délits
2010 : 42 délits.
On comprend mieux pourquoi ils nous cachent les résultats des années précédentes !
Deux postes sont en hausse :
Les cambriolages : 7 en 2009 contre 13 en 2010
Les infractions à la législation sur les stupéfiants : 1 en 2009, 7 en 2010 et en commentaire :
700% d'augmentation d'infraction à la législation sur les stupéfiants, autrement dit ,700% de plus de fumeur de shit ! Tout cela, pour bien frapper l'opinion des élus et faire oublier qu'il y a eu moins de délits en 2010 qu'en 2009. Là encore l'imposture s'exprime ! J'exhorte mes collègues élus des autres villages à demander une étude statistique précise, sur au moins 5 ans de la délinquance dans leur village. L'investissement exorbitant qu'exige ce système doit au moins se justifier par une augmentation significative de la délinquance locale, facilement quantifiables et non pas se contenter des faits divers.
Toutes les enquêtes de victimation montrent une réduction des vols et des cambriolages en France depuis le milieu des années 1990.
( Source : centre de recherche sociologique sur le droit et les institutions pénales – CNRS)
Les gendarmes nous proposent 6 sites pour poser les 8 caméras, sur les axes principaux :
montée rouge, avenue du puit vieux, chemin du champ de mars( pont sur l'autoroute), sur la route de Calvisson pour surveiller l'impasse des Brézine, Rue de La grande terre et la place.
Pour qui connait MUS, il y a deux accès par des chemins carrossables qui débouchent sur le quartier des MAS et un par la route de calvisson qui débouchent sur le chemin de Pascalet. Mon propos n'est pas de dire qu'il faudrait encore trois caméras de plus, sachant, comme je vous le démontrerai, que la videosurveillance ne sert à rien, mais que le raisonnement absurde par lequel on va tout surveiller, ne tient pas. Un malfaiteur n'aura aucune difficulté a trouver ces itinéraires le mettant à l'abri, ainsi que des astuces pour tromper les caméras comme cagoule, parapluie, botte, fausses plaques d'immatriculation.
Martin Gill en 2005 a démontré que les délinquant adoptent rapidement des mécanismes de dissimulations et des stratégies d'adaptation à l'« outil vidéo ».Source :Martin Gill and Angela Spriggs, Assessing the impact of CCTV, Home Office Research Study n°292. Home Office: London, 2005. www.homeoffice.gov.uk/rds/pdfs05/hors292.pdf
Le système préconisé à MUS ne sera qu'un visionnage différé pour les besoins d'une enquête diligenté par une plainte au service de gendarmerie. Donc, pas de supervision en temps réel 24h sur 24h. En d'autre terme, c'est la commune qui va payer à la gendarmerie des outils d'enquêtes en cas de plainte. L'enquête de police est une fonction régalienne, ce n'est pas aux collectivités locale à payer. Les enregistrement ne se feront que sur 7 jours puis seront effacés automatiquement. Si vous êtes cambriolé au début de vos vacances, il n'y aura plus d'enregistrement quand vous constaterez le vol !
Ce sera des citoyens mussois habilités par je ne sais quelle autorité qui pourront avoir accès au local et aux images. Votre voisin sera peut-être celui là. C'est pas forcément rassurant!
De l'aveu même des gendarmes, ce système n'est pas optimal (p 22 du rapport). A 80000 euros ça fait mal! Cependant il est évolutif, disent-ils, il ne se conçoit que dans une mise en réseau de toutes les caméras de la communauté de communes et une supervision 24h sur 24 qui serait assuré par des agents de la COMCOM.
Le prix d'une cameras de videosurveillance est en moyenne de 20000 euros . Un agent chargé du visionnage revient à 26000 euros. Il faut un agent pour 5 cameras. (rapport videosurveillance et espaces publics de l'IAU)
Imaginons 100 cameras pour toutes la communauté de commune ( chiffre bien en dessous de la réalité qui nous attends, vous en conviendrez, il y en a déjà 8 à MUS de prévues). Il faudrait 2O agents qui couteraient en fonctionnement 560000 euros /an à notre petite communauté de commune déjà en déficit ! Ce n'est pas tout, à entendre la gendarmerie, il faudrait des équipes de policiers municipaux pour agir sur place et réaliser les flagrants délits. Croyez vous que l'équipe actuelle pourrait assumer cette tache. Bien sur que non ! Il faudrait aussi embaucher des policiers municipaux et inter communaux. Tout cela financé par la collectivité locale.
Voilà ce qu'on voté les 11 conseillers municipaux de MUS, pressés de faire la fête ! Un diagnostic de sécurité de la gendarmerie mal ficelé pour un projet dément et qui va couter une fortune à la commune et à la communauté de commune. Le tout, fait à la sauvette. Le conseil n'était même pas affiché en mairie.
J'exhorte les élus des autres communes à communiquer entre eux, réfléchir, débattre avec les citoyens et ne pas voter les yeux fermés quelque chose qui n'est une absurdité.
Tout cela pour un système appelé « videoprotection » qui n'a donné aucune preuve de son efficacité dans le monde entier.
En France il n'existe pas d'études à méthodologie scientifique appréciant l'efficacité de la vidéosurveillance. En effet, pour qu'une étude puisse être fiable, il faut pouvoir éliminer tout les biais. L'on ne peut pas comparer une caméra posée dans une rue bondée d'un centre ville et celle dans le milieu fermé d'un parking, ni même celle qui est sur la place de MUS et celle posée dans un métro. De même l'on ne peut pas juger de l'efficacité des caméras sur les chiffres de la délinquance générale qui englobe les escroqueries et les vols à la roulotte, ni même toutes les atteintes à l'intégrité physique qui englobent les violence intrafamilliale comme viol et inceste avec les vol avec violences dans la rue. C'est précisément ce que fait sans vergogne le rapport sur l'efficacité de la vidéosurveillance pondu à la hâte par le ministère de l' intérieur en juillet 2009. On comprend mieux pourquoi aucun scientifique n'y a été associé. Ce rapport grand guignolesque n'est même pas cohérent dans ses conclusions. Il affirme l'efficacité de la vidéosurveillance et produit des chiffres qui disent le contraire. Des sociologues de renom comme Tanguy Le goff et Laurent Muchielli ont démonté ce rapport (Vidéosurveillance : un rapport qui ne prouve rien Par Tanguy LE GOFF * et Eric HEILMANN ** )
En revanche en Angleterre, le pays le plus vidéosurveillé du monde, ont été réalisés plusieurs dizaine d'études depuis les années 1990.
Un rapport a été produit par l'institut d'aménagement et d'urbanisme de l'ile de France en 2008. Ce rapport a précisément décortiqué 4 études anglosaxone réalisées entre 1999 et 2005 et qui font référence en la matière par leur sérieux méthodologique .
Leurs conclusions ?
Efficacité dissuasive : Pas evidente
variable sur le type d'espace surveillé. La seule efficacité reconnue est dans les atteintes aux biens dans les milieux fermés(parking),ailleurs faible impact.
Aucun effet sur les délits impulsifs lié aux drogue ou à l'alcool
Impact sur le sentiment d'insécurité : très limité à nul
Impact statistique sur l'identification et arrestation : faible à nul. Ce que confirme le rapport de l'Inspection générale de l’administration, de la gendarmerie et de la police nationale de 2009.
Source: Tanguy Le Goff, Vidéosurveillance et espaces publics. Etat des lieux des évaluations conduites en France et à l’étranger, IAU île-de-France, Paris, octobre 2008.
-Mike Neville, responsable du Bureau des images, identifications et détections visuelles (Viido) de Scotland Yard. déclarait en 2008: "La vidéosurveillance, implantée à grande échelle au Royaume-Uni, est un « véritable fiasco » et n'a pas réussi à faire reculer la criminalité. Des milliards de livres ont été dépensés dans le matériel mais on n'a pas réfléchi à la manière dont la police allait utiliser les images et comment elles seraient présentées devant un tribunal »
Source : The télégraph CCTV cameras: If they do not stop crime or catch criminals, what are they for?
-Plus récemment un rapport de la Chambre régionale des comptes de Rhône-Alpe concluait en Mai 2010 au sujet de la vidéosurveillance installé à Lyon (l'une des ville des plus vidéosurveillée):
« En l’état actuel des données, relier directement l’installation de la vidéosurveillance et la baisse de la délinquance est pour le moins hasardeux.
Si l’on compare par exemple l’évolution de la délinquance de voie publique (DVP) entre Lyon, qui a fortement investi dans ce domaine, et Villeurbanne, où la commune n’a pas souhaité s‘y engager, on observe que la baisse est plus forte dans la commune qui ne bénéficie d’aucune caméra de voie publique.
La baisse observée à Lyon (où se déroulent plus de la moitié des faits) est dans la moyenne de celle observée sur l’ensemble de la circonscription de sécurité publique (CSP) de Lyon, alors que celle enregistrée à Villeurbanne est nettement supérieure »
Pour la ville de Lyon on a évalué le prix de la vidéosurveillance entre 2,7 et 3 millions d’euros.
Comme vous pouvez le lire, l'efficacité de la vidéosurveillance est loin d'être aussi évidente. Au prix où elle va nous être vendue, j'affirme que c'est une escroquerie pure et simple. Les cameras de videosurveillance n'apportent qu'un certain confort aux forces de police exsangue de notre pays, dont les effectifs ne cessent de fondre au nom du principe du non remplacement d'un fonctionnaire à la retraite sur deux. De l'aveu même de l'officier de gendarmerie de la brigade de Vauvert, il ne dispose que de 20 Gendarmes pour assurer la sécurité du secteur.
Que dit le rapport de l'IAU Ile de France à ce sujet ?
« Avec la vidéosurveillance, les policiers nationaux bénéficient de ressources supplémentaires pour un cout faible voir nul puisque ce sont les collectivités territoriales qui assument financièrement la mise en œuvre de la technologie »
Source :Vidéosurveillance et espaces publics. Etat des lieux des évaluations conduites en France et à l’étranger, IAU île-de-France, Paris, octobre 2008.
Dans un article de Laurent-Mucchielli, chercheur au CNRS, on peul lire:
« Il est clair qu’en l’état actuel, les forces de sécurité de l’Etat n’ont ni les moyens, ni l’envie de se mobiliser sur le champ de la tranquillité publique qu’elles désinvestissent depuis plusieurs années. Leur intérêt est ailleurs : récupérer des images pour renforcer le travail d’élucidation et d’arrestation des délinquants. La gestion de la vidéosurveillance est ainsi déléguée à des collectivités locales qui en assument la charge financière, mais l’Etat garde la main par un transfert d’images qu’il peut utiliser pour ses propres finalités : l’identification de suspects, le maintien de l’ordre ou la filature dans le cadre d’enquêtes. »
Source :La vidéosurveillance est-elle une réponse efficace à la délinquance ? Laurent-Mucchielli.
J'exhorte encore une fois, les élus et responsable des collectivités territoriales d'exiger des chiffres sérieux, supervisés par des gens compétents. Aux gendarmes le maintient de l'ordre, aux statisticiens et sociologues les chiffres et tout le monde sera bien gardé ! Il ne faut pas accepter le chantage à la subvention qui sert de carotte pour obliger les communes à se lancer dans la voie hasardeuse de la vidéosurveillance, course en avant technologique perpétuelle pour compenser son manque d'efficacité, avec le sempiternel argument : si c'est pas efficace c'est que nos cameras sont obsolètes, elles ne sont pas numérique. Dans cinq ans ce sera : « Si ça ne marche pas c'est qu'il faut un logiciel détecteur ! » Puis ce sera la nécessité d'un enregistrement en 3D . A chaque fois, c'est nous qui seront obligés de financer ce gadget inutile. Car sans moyens humain pas d'efficacité à attendre, dans tout les cas rien en proportion des sommes avancées.
Pour mémoire voici quelques chiffres du cout en euros de la videosurveillance dans quelques villes de France :
Grenoble 2005 68 000
Puteaux 2006 3 millions
Strasbourg 2004 2,6 millions
Avignon 2003 1 million
Amiens 2002 800 000
Roubaix 1998 1 million
Levallois - Perret 1993 3 millions
Sans parler de la maintenance !
Source :Vidéosurveillance et espaces publics. Etat des lieux des évaluations conduites en France et à l’étranger, IAU île-de-France, Paris, octobre 2008.
Franchement de telles sommes pour un système à l'efficacité plus que douteuse ! Est-ce bien raisonnable ? N'est-ce pas un crime de dilapider ainsi l'argent public ?
Ne pourrait-on pas appelé cela vidéoescroquerie ?A qui profiterait ce vidéo détournement d'argent public ?
Les seul bénéficiaires de ces marchés juteux seront Ineo, fililale de GDF-Suez, Citélum, spécialisée dans l’éclairage public et filiale d’EDF et Véolia ou SFR-Thales-Sogetrel, Alcatel-RATP-Cegelec et Orange, associé à ETDE, filiale de Bouygues.
A moins que ce ne soit Cipceo, dirigée par Fabrice Hortefeux, le cousin de Brice. Basée en Bretagne, sa société - qui nie tout conflit d’intérêt - revendique des contrats de vidéosurveillance dans “10 à 15 villes”, dont Le Havre (UMP), Roscoff (droite) ou Dinan (UMP). Pourquoi pas à MUS pour Mme Lopez et son équipe (UMP ?)
Voilà tout ce que j'avais à dire au conseil du Vendredi 15 Avril, et que l'on m'a interdit de développer jusqu'au bout sous prétexte que je n'avais pas le monopole du savoir! Personne n'a le monopole du savoir! Mais tout conseiller a le devoir d'essayer de comprendre en se documentant, celui ou celle qui ne le fait pas s'octroie le monopole de la bêtise!
Christian MARTIN